Un premier foyer de 7 cas de dengue est apparu en août, dans le Var, à Fayence. Suivi de deux autres foyers de 45 cas de dengue apparus dans les Alpes-Maritimes sur deux secteurs proches : à Saint-Jeannet de juillet à septembre et à Saint-Laurent-du-Var entre début août et mi-septembre.
Lors de la survenue d’un foyer de dengue autochtone, c’est le maire de la commune concerné qui est informé en premier lieu de la situation. Il est sollicité pour une collaboration des services communaux à toutes les opérations visant à informer la population et à contenir le risque de diffusion de l’épidémie.
Découvrez l'interview de Julie Charles, Maire de St Jeannet qui a participé à la gestion de cette situation inédite.
Avez-vous été surprise d’apprendre la survenue de cas autochtones de Dengue sur votre commune ?
J’ai plutôt été surprise, car même si nous avons sur notre secteur une population de moustique constituée uniquement de moustique tigre depuis plusieurs années, nous ne nous imaginions pas avoir de cas autochtones de Dengue.
Mon premier réflexe, en apprenant le premier cas avéré, a été de penser qu’il s’agissait d’une personne revenant de l’étranger, ce qui s’est avéré erroné. La nouveauté est là, et il va falloir apprendre à l’appréhender et faire preuve de résilience.
Comment avez-vous vécu cette succession de cas de Dengue et les interventions de l’EID Méditerranée, de l’ARS Paca et de Santé publique France ?
Nous avons connu sur l’été 2022 la succession d’une trentaine de cas sur différents secteurs de notre commune qui compte un peu plus de 4 400 habitants.
Face à cette situation inédite, nous avons pris le parti d’être totalement transparents avec nos administrés à chaque étape (nouveaux cas, secteur concernés, traitements réalisés). La communication systématique permet de faire face à la situation, d’éviter la circulation de fausses informations, avec comme objectif de rassurer la population et d’être plus efficace sur le volet de la prévention.
En parallèle, nous avons travaillé en pleine collaboration et avec une communication continue avec l’ARS Paca et les différents intervenants.
Nos services communaux et nos agents se sont pleinement investis, que ce soit notre Directeur Général des Services, nos Services Techniques ou notre Police Municipale. Je leur en suis extrêmement reconnaissante car cette situation a induit un travail supplémentaire non négligeable pour une commune de notre taille.
S’agissant d’une problématique de santé publique, la démoustication avec l’usage de produits spécifiques a été mise en place par les services de l’ARS pour lutter contre la prolifération des moustiques tigres dans les secteurs d’habitation des cas de Dengue détectés.
Une partie de la population a exprimé une appréhension voire un rejet total du traitement utilisé pour la démoustication, les modalités effectives du traitement n’aidant pas à apaiser les craintes (traitement de nuit, combinaisons de protection totale des intervenants, pas d’animaux domestiques en extérieur…).
Avec le recul, les 2 points d’amélioration sont la pédagogie en amont sur les « bons gestes » et la communication faite aux usagers concernant les traitements et leur modalité pour une meilleure compréhension et acceptation.
Selon vous comment lutter plus efficacement contre la prolifération du moustique tigre ?
Par la pédagogie, rappeler sans cesse les bons réflexes à avoir !
Et en restant vigilant sur les lieux en friche, comme une maison inhabitée et non entretenue avec piscine par exemple ou bien encore comme les bassins d’eau très fréquents dans les propriétés privées sur notre territoire.
Est-ce que vous pensez que vos administrés ont pris conscience de leur rôle essentiel dans la lutte contre la prolifération ?
Nous avons communiqué dès le premier cas détecté sur notre commune par tous les canaux possibles (réseaux sociaux, site internet, bulletin municipal, panneaux d’information, application citoyenne) sur les bons gestes à mettre en place.
L’ARS Paca a également mis en place sur la commune un groupe « d’ambassadeur » de bonnes pratiques se déplaçant de porte à porte sur la commune. Cela a permis aux administrés d’avoir accès aux informations nécessaires et à leur bonne mise en pratique pour lutter efficacement contre la prolifération des moustiques tigres et des cas de Dengue.
Le nombre de cas de Dengue détectés sur notre commune n’étant pas anecdotique, la population a pris conscience de l’importance de la mise en œuvre de ces bonnes pratiques. Et je sais pouvoir compter sur leur intelligence collective.
Après cet épisode, votre regard sur le moustique tigre et les maladies qu’il peut véhiculer a-t'il changé ?
Bien évidemment, depuis l’épisode de l’été dernier, nous ne percevons plus le moustique tigre de la même manière !
Nous devons prendre conscience qu’avec le changement climatique, dorénavant, il peut être porteur de maladies auxquelles nous n’avons pas l’habitude d’être confrontés et qu’il reste présent et actif jusqu’à l’automne selon la météo !
Depuis l’été 2022, avez-vous mis en place des actions de mobilisation sociale et/ou de lutte contre la présence du moustique tigre pour limiter le risque de réapparition de cas autochtones de dengue sur votre commune ?
Dès le moi de mai, et nous continuerons tout l’été, nous avons relancer une campagne de communication auprès de la population en prévention.
Ce rappel, en tout début de saison, avant même leur apparition permettra d’anticiper leur prolifération si chacun joue son rôle. De plus, en collaboration avec l’ARS, les « ambassadeurs » doivent revenir sur notre commune dans le cadre de cette prévention.
Si vous deviez transmettre un message aux autres maires de la région à propos de cette expérience, que souhaiteriez-vous leur dire ?
Je ne souhaite cette expérience à aucun d’entre eux ! Et j’espère de tout mon cœur qu’ils n’y seront pas confrontés ni leurs administrés.
Mais ce n’est qu’un vœux pieu… Mieux vaut prévenir que guérir ! Informer et éduquer aux bons gestes ne demandent pas des grands moyens mais permettra de minimiser les risques et de passer un bel été !