Interview de JB CORTEZ, Responsable du pôle Démoustication / Plan Communal de Sauvegarde à la Direction Prévention Sécurité de la ville de Hyères.

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Portrait JB CORTEZ

La mairie de Hyères est engagée depuis de nombreuses années dans un plan de lutte contre le moustique.

Découvrez l'interview de JB CORTEZ, Responsable du pôle Démoustication / Plan Communal de Sauvegarde à la Direction Prévention Sécurité de la ville de Hyères.

La mairie de Hyères est engagée depuis de nombreuses années dans un plan de lutte contre Aedes albopictus : quelles ont été les raisons de cet engagement ?

Les conditions climatiques ayant énormément été modifiées ces dernières années, par des précipitations importantes et répétées, des températures élevées même en période hivernale, tous ces paramètres ont modifié le cycle de vie du moustique et accentué les nuisances générées par l'Aedes Albopictus.

L’année 2018 a été particulièrement significative de ces modifications, des éclosions ont été constatées jusqu’à fin décembre.

De plus, la ville regroupe des aléas favorables au développement exponentiel pour l'Aedes Albopictus : Territoire de 13 400 ha, nombreuses résidences secondaires non entretenues, exploitations agricoles en nombre considérable, 28 établissements hôteliers de plein air (campings), immeubles privés et bâtiments communaux propices aux nuisances (toits plats, terrasses à plots, soucoupes et coupelles, rigoles d'évacuation pluviales mal entretenues...).

Enfin, la collectivité a connu en en Octobre 2019, des cas autochtones de Zika sur un de ses quartiers.

Des actions de lutte anti-vectorielle ont été mises en œuvre par l’EID Méditerranée, dans le quartier de résidence de la personne atteinte : recherche du moustique-tigre, démoustication, placement de pièges à moustiques. Toutes ces actions ont été précédées d’une campagne d’information de la population résidant dans le quartier concerné.

L’Agence Régionale de Santé, Santé Publique France et l’EID Méditerranée ont poursuivi leurs investigations (entomologiques et épidémiologiques) pour déterminer l’origine du cas et éviter la propagation de la maladie.

Les actions de surveillance épidémiologique ont été renforcées pour identifier les personnes qui pouvaient être également contaminées. Une enquête séroprévalence pour rechercher d’éventuels cas dans le voisinage a été diligentée. Les hôpitaux, les médecins libéraux et les laboratoires d’analyse médicale du secteur concerné ont été contactés pour repérer les personnes qui pourraient présenter les symptômes du Zika et les signaler à l’ARS.

 

Pouvez-vous nous dire quels ont été les programmes d’actions qui ont été déployés localement et les résultats obtenus ?

Avant 2020, il n’existait pas de plan d’action pour faire face à une sortie invasive des moustiques, mais devant le risque que ce dernier puisse dans certains cas être vecteur d’agents pathogènes à l’homme, il convient de se prémunir et d’envisager un plan efficace à déployer pour assurer des actions renforcées.

Un plan spécifique a donc été mis en place afin d'organiser au mieux la lutte sur le territoire :

  • Achat et installation de pièges anti-moustiques, via un marché négocié, sur les zones sensibles du territoire communal (1 800 000 Euros d’investissement et de fonctionnement budgétaire sur une phase triennale),
  • Actions transversales et partenariales avec les propriétaires et gestionnaires de sites (zones humides) → Conservatoire du Littoral, MTPM, propriétaires privés,
  • Chantiers de débroussaillement pour faciliter les traitements effectués par les agents communaux (obtenir une efficacité maximum des produits biocides),
  • Renouvellement du marché pour les traitements par voie aérienne (ULM),
  • Actions d’informations et de loisir éducatif dans les centres périscolaires et dans les accueils de loisirs (support éducatif fourni par le CODES)
  • Création d’un dépliant relayant les bonnes pratiques à adopter par la population, les actions engagées par la Ville et les renseignements sur les types de moustiques. Il est distribué à l’ensemble des élèves scolarisés dans les écoles, les CIL, les campings, les accueils municipaux, les établissements hospitaliers…,
  • Distribution d’affiches spécifiques sur le moustique tigre dans les ERP (comme pour les Risques Majeurs),
  • Mise en place d’une équipe municipale (2 agents) mobile pour diagnostic et aide aux particuliers. Ils effectueront également le contrôle des bâtiments communaux afin de prévoir les actions ASSEC qui devront être effectuées par les services communaux (actions mécaniques après chaque épisode pluvieux, travaux de réduction des eaux stagnantes...),
  • Réunion publique à prévoir avant saison pour exposer le plan généré par la Commune et intervention du SCHS sur cette thématique lors du forum Santé-Environnement,
  • Plan de communication sur tous les supports disponibles (Réseaux sociaux, site internet de la ville, presse écrite, radios locales…),
  • Acquisition en 2024 d'un dispositif numérique de mobilisation sociale pour les collectivités (disponible gratuitement sur App Store et Google Play), grâce à cette application, les habitants disposent d’un accompagnement quotidien pour :
  • Comprendre l’impact des moustiques ;
  • Connaître son potentiel de nuisance ;
  • Apprendre les bons gestes pour diminuer l’impact ;
  • Interagir avec leur entourage pour diffuser les bonnes pratiques ;
  • Réaliser des actions tous les jours et faire diminuer son potentiel ;
  • Exprimer en temps réel le niveau de nuisance ressenti là où ils se trouvent.

Cette application ludo-pédagogique maintient la motivation des habitants dans le temps en les faisant progresser (gains de points et de niveaux d’expertises, impact de leurs actions sur leur nuisance).

L’ensemble de l’activité des utilisateurs est analysé afin d’en déduire les indicateurs nécessaires à l’animation de la démarche et à la priorisation de l’action municipale :

  • Suivi des téléchargements
  • Suivi de l’activité (sur l'application de mobilisation sociale, actions, progression)
  • Géolocalisation par quartier
  • Comparaison avec la communauté et partages d’expérience

La collectivité peut adapter son dispositif en fonction des données :

  • Animation par quartier qui le nécessite
  • Démoustication des zones les plus critiques
  • Démonstration aux habitants que la commune est proactive

 

Parmi l’ensemble des actions expérimentées et mises en place, y en a-t-il que vous recommanderiez particulièrement à d’autres communes ou collectivités pour leur efficacité ?

Concernant les actions déjà expérimentées auprès de la population, je citerai en recommandation :

  • Les Actions d’informations et de loisir éducatif dans les centres périscolaires et dans les accueils de loisirs (organisation de chasses aux gites larvaires avec remise de diplômes « chasseur de moustiques », visionnage de vidéos ludiques, démonstration des moyens opérationnels de traitement...). Le secteur éducatif est un vecteur d'information préventive et de sensibilisation essentiel à notre démarche (intéressement des parents aux activités de leurs enfants).
  • La mise en place d'une équipe municipale dédiée aux diagnostics chez les particuliers et les établissements privés : les conseils prodigués lors de ces visites permettent une meilleure compréhension des citoyens et un effet constaté de transmission des consignes dans le proche voisinage.

 

Le risque d’apparition de cas autochtones de dengue est de plus en plus présent, en Paca, ces dernières années. Comment prenez-vous en considération la prévention de ce risque dans les actions de communication et de réduction des gîtes larvaires sur la commune en 2024 ?

L’information de la population est très importante pour limiter au maximum l’installation des moustiques et principalement détruire leurs lieux de ponte :

  • dans l’habitat (gouttières, rigoles d’évacuation, soucoupes sous les pots de fleurs, vases, seaux, tout réceptacle laissé à l’extérieur qui a retenu de l’eau après une pluie)
  • les campings (les bondes et grilles d’évacuation, les bassins d’ornement, les soucoupes des pots de fleurs)
  • les cimetières (modifier le mode d’arrosages des pots de fleurs, mettre du sable dans les soucoupes et assurer un arrosage raisonné)
  • surtout supprimer les eaux stagnantes, chlorer les piscines en sortie d’hivers
  • couvrir toutes les réserves d’eau par des moustiquaires (collecteurs et bacs d’arrosage)
  • deux fois par semaine vérifier tout réceptacle pouvant se transformer en gîte larvaire.

Un plan de communication avant la saison estivale est effectué chaque année sur l'ensemble des supports disponibles (Réseaux sociaux, site internet de la ville, presse écrite, radios locales…).

Des communications spécifiques sont également prévues après les épisodes pluvieux afin d'inviter la population à effectuer les bons gestes de lutte et réduction contre les gîtes larvaires.

Nous essayons également de sensibiliser à travers certaines associations avec la mise à disposition de supports numériques d'information LAV (ex: les Comités d'Intérêt Locaux, CCFF, ADPC83...).